Djakarta, envoyé spécial.
Folle journée hier à Djakarta, où l'Indonésie a élu démocratiquement son Président, pour la première fois depuis son indépendance, en 1949. Le leader musulman Abdurrahman Wahid, «Gus Dur» de son nom javanais (lire ci-dessus), a battu la favorite du scrutin, Megawati Sukarnoputri, déjouant les derniers pronostics. Selon le dépouillement des voix des 700 grands électeurs de l'Assemblée consultative du peuple (MPR) qui ont voté à bulletins secrets, Wahid a obtenu 373 voix contre 313 à la très populaire «Mega», fille du fondateur de l'Indonésie, le président Sukarno. Le visage taciturne, celle-ci s'est empressée de féliciter le vainqueur, qui est par ailleurs l'un de ses amis personnels. Tard dans la soirée, le général Wiranto s'est déclaré prêt à accepter la vice-présidence indonésienne «si tous les partis en sont d'accord». Dès l'annonce du résultat, Wahid a manifesté son souci de calmer le jeu et d'éviter toute violence à Djakarta, où les partisans de Megawati manifestaient leur déception.
Chez Megawati. Cette journée historique pour l'Indonésie devait être, pour les partisans de «Mega», l'aube d'une victoire qu'ils croyaient acquise. En fin de soirée, dans la salle désuète du restaurant Ramayana de l'hôtel Indonesia, dans le centre de Djakarta, l'excitation commençait à monter. Quartier général improvisé du Parti démocratique indonésien (PDI) de Megawati, le restaurant est rempli de vigiles du parti, bérets rouges sur la tête, vêtus d'uniforme noir d'