Dili, envoyée spéciale.
Dans les ruines de Dili, le leader indépendantiste Xanana Gusmao pleure. «Je suis anéanti. J'ai du mal à imaginer l'ampleur du défi que nous allons devoir relever.» Après sept ans d'emprisonnement et d'exil, il retrouve un pays dévasté, mais qui doucement revient à la vie. Au Duas Irmas, un restaurant qui a ouvert ses portes début octobre dans une ancienne quincaillerie, le menu est aussi pauvre que les prix sont élevés. Mais à Dili, un maigre poulet vaut aujourd'hui cinq fois plus cher qu'avant le référendum. Fatima Fernandez a investi les lieux, abandonnés par un propriétaire indonésien qui a préféré s'enfuir vers Sumatra. Rares sont les Timorais qui tenaient commerce. Que Fatima la première de la ville à manifester un esprit d'entreprise soit d'origine chinoise n'est pas un hasard. A l'écart. Au Timor, tous venaient s'enrichir. Les généraux de l'armée indonésienne tenaient le monopole du café, les filles de l'ex-président Suharto s'intéressaient aux affaires, et les Chinois de Djakarta faisaient tourner la boutique. «Les Timorais ont toujours été tenus à l'écart. Une situation qui a créé une mentalité qui ne va pas dans le sens du développement économique, explique Manuel Garcia qui fut enseignant sur l'île. La liberté ne suffit pas, il faudra aussi que les Timorais apprennent à s'en servir.» Après l'invasion des troupes indonésiennes en 1975, les Timorais durent apprendre une nouvelle langue, se plier aux coutumes musulmanes de leurs maîtres