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Libération
Reportage

Magomed, fermier tchétchène, raconte sa vie sous les bombes. «Les Russes veulent-ils qu'on s'arme?»

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publié le 10 novembre 1999 à 1h53

Atzhkoï-Martan (Tchétchénie), envoyée spéciale.

C'est le petit matin à Atzhkoï-Martan, un village situé à 45 kilomètres au sud-ouest de Grozny. Toute la nuit, les tirs d'artillerie ont retenti, tantôt du côté droit de la maison, tantôt du côté gauche. Soudain, des fusées éclairantes illuminent la maisonnée endormie. Silence. Puis les explosions. Magomed, 45 ans, le propriétaire des lieux, est né au Kazakhstan lorsque les Tchétchènes y ont été déportés. Il est revenu sur les terres de ses ancêtres dès qu'il a pu. Aujourd'hui, il est fier que son fils Djokhar, 11 ans, devienne le huitième propriétaire du domaine, la terre étant cédée de génération en génération. Cette guerre rend Magomed malade. «Venez, je vais vous montrer un petit terroriste, il est né il y a une semaine», déclare-t-il, ironique. Au fond de la cour, au milieu des poules et des dindons, se pressent une dizaine de motos dans une étable de bois. Un agneau vacille encore entre les pattes de sa mère: «C'est lui le terroriste!»

«Ennemi du peuple». Magomed est fermier, parce qu'ici, tout le monde l'est. Mais sa vraie profession est ouvrier en bâtiment. «Sous l'Union soviétique, se remémore-t-il, c'était le communisme et c'était finalement beaucoup mieux. On pouvait se rendre là où l'on voulait. Combien de fois n'ai-je pas sillonné ce pays pour y construire des maisons. Alors, j'étais considéré comme un homme bien. Depuis que cette Union soviétique a été détruite, comme tous mes congénères, je suis immédiatement deven