Touchka, envoyé spécial.
Les pelleteuses en moins, la construction des pyramides a dû ressembler à cela: un gigantesque chantier où les hommes s'agitent telles des fourmis sous un soleil de plomb. Pour l'instant, ce n'est rien d'autre qu'un immense trou mais, dans trois ans, sera achevée la pompe la plus puissante du monde, un monstre capable d'aspirer 25 millions de mètres cubes d'eau par jour dans le lac Nasser. Le précieux liquide coulera alors dans le canal Cheikh-Zayed (1) dont la majeure partie des 72 km est déjà creusée. Quatre branches secondaires, longues au total de 168 km, irrigueront 225 000 hectares de ce qui, pour l'instant, n'est qu'un désert aride et désolé.
Il y a trois ans, personne ne connaissait Touchka, un lieu-dit situé au bord du lac Nasser à 1 200 km au sud du Caire, près de la frontière soudanaise. C'est pourtant là que se joue l'avenir de l'Egypte. Avec 62 millions d'habitants concentrés dans l'étroite vallée du Nil et son delta, le pays souffre de l'une des densités les plus élevées au monde: un peu comme si l'ensemble des Français vivait sur une surface grande comme la Bretagne. «Sortir de la vallée est une question de vie ou de mort», explique Diaa Eddine al-Qoussy, coordinateur du projet Touchka au ministère de l'Irrigation et des Travaux publics. «C'est pour cela que nous avons décidé de créer un deuxième delta, au sud du pays. C'est notre nouvelle frontière. Il y a dix mille ans, le désert était extraordinairement fertile. C'est là que la civili