Tout en approuvant la réaction très ferme des quatorze partenaires de Vienne à l'égard de l'alliance entre les conservateurs et l'extrême droite, Robert Badinter doute que l'Autriche puisse se lancer dans une politique violant les principes fondamentaux de l'Union européenne. Pour l'ancien président du Conseil constitutionnel et actuel sénateur socialiste, l'Etat de droit en Autriche et en Europe assure un efficace rempart contre toutes les tentations. En revanche, il estime que la vraie menace pèse sur le bon fonctionnement d'une Union qui compte désormais un gouvernement composé pour moitié d'eurosceptiques.
La réaction politique des gouvernements de l'UE est-elle justifiée?
Absolument. Les déclarations de Jörg Haider sur les «camps de correction» nazis ou sur «l'honneur» des Waffen SS sont répugnantes. Lorsqu'une formation d'extrême droite à l'idéologie xénophobe conduite par un tel chef entre pour la première fois dans le gouvernement d'un Etat membre de l'Union européenne, la réaction politique devait être très forte. Il était nécessaire de rappeler que l'UE n'est pas seulement un espace de libre-échange mais surtout une communauté de valeurs, celles-là même qu'a défiées le régime nazi à l'égard duquel les leaders du FPÖ ont une si évidente nostalgie.
L'émotion suscitée n'est-elle pas malgré tout hors de proportion avec le danger réel que représente Haider?
L'émotion et l'indignation légitimes ne doivent pas nous faire perdre de vue que l'Autriche d'aujourd'hui n'est plus celle des années 30. Ce n'est pas seulement une démocratie incontestable, mais c'est aussi un Etat de droit très structuré. Cela veut dire que le nouveau gouvernement de droit