Il aimait bien le nouvel an chinois quand il était petit. Les
parents, oncles et amis à Nankin glissaient un petit billet sous son oreiller pendant qu'il dormait, il filait voir le dragon dans les rues et il y avait les pétards, pour éloigner les mauvais esprits. La magie s'est un peu envolée avec l'âge: «Les pétards sont interdits dans les villes à cause des incendies, explique Jing. On se retrouve pour le nouvel an en famille, on mange, on regarde la télé. Il y a des programmes spéciaux, à la télé.» Jing a débarqué en France avec un visa d'étudiant il y a deux ans, boucle sa maîtrise d'économie et ne fréquente la communauté chinoise que pour faire ses courses. Il va certes fêter l'année du Dragon samedi dans un restaurant parisien. Mais avec des copains français et ce n'est même pas lui qui choisit le resto.
Trente à cinquante mille personnes vont passer ce week-end à Belleville et dans le XIIIe arrondissement de Paris pour fêter l'événement, mais le folklore du Dragon sert aussi de masque à une communauté qui vient de traverser une rude secousse. L'apparition des sans-papiers chinois au premier rang des manifestants n'a pas beaucoup plu à la communauté traditionnelle, qui gère depuis des années et à ses conditions l'intégration discrète des nouveaux immigrants.
La première diaspora s'installe à Paris avec la guerre de 1914 et s'étoffe depuis constamment. Il y aurait autour de 200 000 Chinois en France aujourd'hui, selon Emmanuel Ma Mung, directeur de Migrinter, un laboratoir