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Libération

En Russie, le retour de l'«info-KGB». Le pouvoir s'en prend de plus en plus aux journalistes.

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publié le 12 février 2000 à 22h17

Moscou, de notre correspondant.

«Aujourd'hui, Babitski; demain, toi, moi, lui ou elle.» Place Pouchkine, vendredi, dans le dos de la statue du poète qui connut les affres de la censure tsariste, le calicot exprimait bien l'inquiétude des journalistes venus soutenir leur collègue de Radio Svoboda (antenne russe de Radio Free Europe), Andreï Babitski, arrêté près de Grozny le 16 janvier, puis prétendument échangé contre des soldats russes prisonniers, et dont on est toujours sans nouvelles fiables.

Accents de dissidence. Devant plus de 500 manifestants, les orateurs (journalistes moscovites, députés démocrates, représentants de mouvements comme Glasnost, etc.) ont parlé de dictature, d'informations falsifiées" Beaucoup voyaient dans l'arrestation de Babitski le «symbole» menaçant d'une perte «de ce que nous avons gagné» (la liberté de la presse). Rôdait là l'atmosphère du temps d'avant: les accents de la dissidence.

Babitski était le seul journaliste russe à couvrir les événements côté tchétchène. Il en paie le prix. Une lettre d'un soldat russe du «camp de filtration» de Tchernokozovo, publiée dans le Monde de vendredi, dit les atroces souffrances des Tchétchènes qui y sont détenus. Babitski serait passé par ce camp: «On n'a pas été jusqu'à le sodomiser, mais il a été vraiment cogné et humilié», écrit le soldat.

L'affaire Babitski, une arrestation suivie d'un «échange» suspect puis d'une disparition, alimente le soupçon d'une «KGbétisation» rampante de l'information en Russie. L