Belfast, envoyé spécial.
Dans Belfast-Ouest noyé de pluie et de brume, les petites dames aux arrêts de bus jettent un oeil au dernier poster de Sinn Féin, d'un jaune incongru. «Ne les laissez pas saborder l'accord du vendredi saint», demande le parti républicain qui affiche les photos de Peter Mandelson, ministre britannique à l'Irlande du Nord, de David Trimble, Premier ministre de la province et leader du principal parti protestant, et du révérend Ian Paisley, le Docteur No de la politique locale. Sur plusieurs affiches, les trois portraits ont été rageusement déchirés. Dans ce quartier de Belfast, fortin sans nuance de la communauté républicaine et catholique, la suspension du gouvernement local, vendredi dernier, est mal passée.
«Les gens sont très en colère, ils se sentent frustrés, volés», estime Robin Livingstone, rédacteur en chef de l'Andersontown News, journal de Belfast-Ouest, dédié à la cause républicaine. «Pour eux, le gouvernement britannique a encore une fois cédé aux unionistes (protestants) et enterré le premier gouvernement d'Irlande du Nord, expression de tout le peuple irlandais depuis 1918.» Dans ce monde républicain, le désarmement de l'IRA (l'aile militaire de Sinn Féin) est une question concrète et quotidienne. «Les hommes de l'IRA ne sont pas des extraterrestres, ce sont des amis, des voisins, des membres de votre famille», explique Livingstone, dont le propre frère a fait dix-sept ans de prison. «Même si on n'est pas du côté de la violence, on sait qu