Buenos Aires, de notre correspondante.
L'homme-symbole de la répression sous la dernière dictature argentine (1976-1983), l'ex-officier de marine Alfredo Astiz, est depuis vendredi sur le banc des accusés. «Assassin! Assassin!» Dès son entrée dans la salle d'audience, Astiz a été accueilli par les insultes lancés par des fils de disparus.
A la suite de déclarations publiées en janvier 1998 dans la revue Tres Puntos, plusieurs associations des droits de l'homme avaient porté plainte pour «apologie du délit et incitation à la violence». «Les disparus, on les a nettoyés, il n'y avait pas d'autre remède. ["] L'armée m'a appris à détruire. ["] Je suis l'homme le mieux préparé techniquement dans ce pays pour tuer un homme politique ou un journaliste.» Le cynisme de ces propos suscita un tollé. Une semaine plus tard, Alfredo Astiz était destitué et expulsé de la marine.
«Je ne sais pas pourquoi, après tant d'années de mutisme, Astiz a accepté cet entretien», affirme Gabriela Cerruti, à l'époque reporter à Tres Puntos. Pendant deux longues heures, dans l'hôtel naval de Buenos Aires, celui que la presse surnomme «l'ange blond de la mort» avait donc parlé de la sale guerre où, selon les organisations des droits de l'homme, 30 000 opposants ou supposés tels ont disparu. Il a évoqué la junte militaire («Des lâches, ils n'ont pas osé dire qu'ils les ont tous fusillés») et l'Ecole de mécanique de la marine (Esma), un centre clandestin de torture où il opérait avec les commandos qui séquestra