Moscou, de notre correspondante.
«En arrivant au camp de Tchernokozovo, j'ai eu la procédure réservée à tous les nouveaux venus: on doit ramper par terre et les coups de matraque en plastique pleuvent; c'est douloureux mais on survit.» A peine relâché, le journaliste Andreï Babitski, disparu depuis la mi-janvier dernier, a témoigné hier sur les exactions russes en Tchétchénie: «Tout ce qu'on a lu sur les camps staliniens et sur les camps allemands, c'est ce qui se passe à Tchernokozovo.»Correspondant de Radio Svoboda, une radio subventionnée par Washington, Babitski, 35 ans, avait été arrêté à la mi-janvier par les forces russes à la sortie de Grozny. L'un des très rares journalistes russes à couvrir la guerre côté tchétchène, il était détesté des militaires pour ses reportages contredisant la propagande officielle. Il décrivait les destructions aveugles des bombardements russes, les victimes civiles, les soldats morts abandonnés sur le terrain, etc.
Réapparu dimanche à Makhatchkala (Daguestan), Babitski a d'abord passé deux semaines au «camp de filtration» de Tchernokozovo (nord de la Tchétchénie) où sont détenus les Tchétchènes soupçonnés d'avoir combattu aux côtés des boïviki. Il est alors inculpé de «complicité avec une bande armée», crime passible de cinq ans de prison. «Ce que j'ai subi en arrivant n'est rien comparé aux traitements que l'on inflige 24 heures sur 24 aux Tchétchènes», explique-t-il dans une interview à la chaîne privée NTV, accordée à son arrivée à Moscou