En vingt-quatre heures, le Sénégal a offert au monde deux images fortes, rarement associées à l'Afrique: dimanche soir, peu avant minuit, celle d'un opposant historique, vainqueur d'une élection, acclamé par une foule en liesse devant son domicile. Me Abdoulaye Wade venait de mettre fin à un régime de «parti-Etat», vieux de quarante ans. Puis, hier, peu avant midi, sans même attendre que soit annoncé le résultat officiel du scrutin, un communiqué de la présidence a reconnu la défaite d'Abdou Diouf. Après dix-neuf ans au pouvoir, le chef de l'Etat venait de téléphoner à son adversaire pour le féliciter de son élection et pour évoquer les modalités de la passation du pouvoir, début avril. Plus que jamais, Dakar, la capitale la plus occidentale du continent, semble être le phare de la démocratie en Afrique.
Dimanche soir, quelques heures seulement après la fermeture des 8 442 bureaux de vote, l'alternance était déjà devenue une certitude. Les radios libres, grâce à leurs reporters munis de portables, ont égrené les résultats un par un. A Dakar et dans d'autres grandes villes, Abdoulaye Wade l'emportait avec une marge irrattrapable pour le candidat sortant. Aussitôt, ses partisans ont convergé vers son domicile, au quartier «point E», pour fêter une victoire sans précédent dans l'histoire du pays. Rapidement, la sono au coin de la rue, pourtant assourdissante, ne parvenait plus à couvrir les cris de «Wade, président».
A l'intérieur de la villa, le maître des lieux, quatre fois bat