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Libération

Maroc: retour sur les années noires. L'Etat et les victimes du régime prônent la réconciliation plutôt que la justice.

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publié le 21 mars 2000 à 23h26

Rabat, envoyée spéciale.

Il n'y a pas eu un mot, pas un chant devant le tristement célèbre centre Derb Moulay Chérif, seulement quelques photos de victimes des «années noires», des fleurs et des bougies grimpant jusqu'à la porte de ce symbole d'un temps que les Marocains veulent révolu. Il n'y a eu que le silence des mille personnes venues se recueillir ce 4 mars, à l'appel du Forum marocain pour la vérité et la justice, devant cette bâtisse banale de Casablanca où ils furent des milliers à être détenus et torturés sous le règne de Hassan II. «Je ne veux pas me venger, je veux savoir où sont passées dix années de ma vie, dit doucement Ahmed, qui y transita. Faire comme s'il ne s'était rien passé en répétant: "Allons de l'avant, c'est très grave. On ne peut avancer qu'en disant: "Plus jamais cela, et sur la base d'un passé épuré et assumé.»

Huit mois après l'intronisation de Mohammed VI, la volonté de milliers de Marocains de comprendre pourquoi l'histoire de leur pays s'est déroulée ainsi a fait des mouvements d'anciens prisonniers d'opinion et de droits de l'homme l'une des forces les plus dynamiques de la société. «Ils permettent de conditionner la culture politique ambiante en mettant l'Etat et les forces politiques devant leurs responsabilités et en contribuant à édifier une conscience», estime Fouad Abdelmoumni, un ancien détenu.

Embarras. Le combat dépasse les cercles de gauche ou les intellectuels. Surtout au moment où Mahmoud Archane, un ancien tortionnaire, ex-commis