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Libération

A Bangkok, les jeunes détenus investissent la rue. Délinquants brimés et oubliés, ils provoquent des émeutes.

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publié le 28 mars 2000 à 23h14

Bangkok, de notre correspondant.

Qui se soucie à Bangkok des milliers de jeunes délinquants thaïlandais parqués dans des centres de détention aux noms bien intentionnés ­ «maison de compassion» ou «maison de pitié» ­ qui sont sagement construits dans les banlieues de la capitale? Ils sont d'habitude oubliés derrière leurs grilles et leurs murailles. On n'entend guère parler d'eux, si ce n'est de temps à autre par un travailleur humanitaire ou un prêtre offusqués qui se fendent d'une lettre lucide et indignée dans la presse locale. Ils n'existent pas, ils sont la face laide du pays, celle qu'il vaut mieux ignorer.

Le voile se lève. Mais, il y a une semaine, ces «mauvais garçons», âgés de 7 à 18 ans, ont pris leur revanche. Excédés par les brimades et les mauvais traitements, ils ont par deux fois fait sauter la porte de leur centre de détention, cassé les murs avec des marteaux pris dans les ateliers. Puis pendant plusieurs heures, armés de bâtons et de tuyaux, ils ont régné sur les rues adjacentes, repoussant les policiers, détournant les taxis et causant la panique parmi les passants. Quelques heures de liberté et de rigolade, et la fierté d'être, pour une fois, au centre de l'attention. Des tirs de lacrymogènes, des canons à eau et la promesse d'une permission de cinq jours ont étouffé la révolte. Mais ces jeunes ont fait parler d'eux. Le voile s'est levé sur le monde de violence et les dures conditions de vie de ces adolescents souvent condamnés pour des infractions mineure