Le Cap, de notre correspondante.
«Mais qu'est ce qui lui prend?» La question est sur toutes les lèvres en Afrique du Sud. «Rares sont les réunions où on ne se pose pas la question», confessait jeudi un long article publié par le Business Day, principal quotidien financier du pays. L'objet de tant de spéculations? Le président Thabo Mbeki lui-même, et la politique qu'il entend promouvoir pour lutter contre le sida. Un sujet potentiellement explosif: avec plus de 4 millions de séropositifs, l'Afrique du Sud détient en effet l'un des plus fulgurants taux de contamination au monde. On estime ainsi que plus de 1500 personnes sont contaminées chaque jour. Or face à une telle catastrophe annoncée, le président semble s'engager dans d'étranges croisades. A l'origine du malaise, le refus obstiné du gouvernement de fournir gratuitement de l'AZT aux hôpitaux publics, et notamment aux femmes séropositives enceintes. L'AZT est réputé réduire de 51% les risques de transmission de la mère à l'enfant. En Afrique du Sud, 23% des femmes enceintes sont séropositives. «Je ne m'explique pas la position de Mbeki sur l'AZT,c'est un mystère», confie le Dr Jerry Coovadia. Professeur de pédiatrie à l'Université du Natal, Coovadia est surtout le principal organisateur de la Conférence internationale sur le sida qui se déroulera en juillet à Durban. Avec quatre autres personnalités du pays, Coovadia a cosigné, il y a près d'un mois, une lettre au chef de l'Etat, lui demandant d'infléchir sa politique.