Lakka, envoyé spécial.
Dans les années 80, c'était la route des plus belles plages touristiques. Aujourd'hui, au large d'une côte où la forêt vierge n'est séparée de l'eau turquoise que par une bande de sable fin, la silhouette de six bâtiments de guerre britanniques découpe l'horizon. Arrivés samedi, un porte-avions, un porte-hélicoptères, deux navires de débarquement, un croiseur et un bateau logistique donnent du courage aux «combattants» qui s'échelonnent le long de la route, à l'ouest de Freetown: d'abord les Casques bleus de l'ONU, qui tiennent les barrages à la sortie de la capitale; puis les soldats de l'armée sierra-léonaise, les réguliers et, ensuite, les partisans de Johnny Paul Koroma, ancien chef d'une junte «révolutionnaire» qui s'est rallié au gouvernement; enfin, les membres de la Force de défense civile, une milice progouvernementale, et les «guérilleros» de tout poil, affublés de gris-gris ou de perruques. C'est un dégradé de normalité, avec la folie en première ligne, au front.
Réinsertion. «On avance, il n'y a plus de rebelles!», s'écrie Christo, 23 ans et étudiant en sciences sociales. Prenant une pose de Rambo, les jambes fléchies, son fusil d'assaut appuyé sur une hanche, il lâche un tir d'écharpe sur quelques arbres en face. Des feuilles voltigent dans le silence rétabli, irréel. «Si on les attrape, on leur coupe les couilles!», jubile Mokthar, 32 ans et «chasseur traditionnel» Kamajor au service du gouvernement. Au milieu de ces hommes, dont très