Freetown, envoyé spécial.
Pour Muctar Jalloh, «la guerre est finie.» Au lendemain de l'arrestation de Foday Sankoh, le seul problème est le bon timing de la mise à mort du chef rebelle du Front révolutionnaire uni (Ruf). «Il faut le garder sous les verrous, le temps que les Casques bleus encore détenus par le Ruf soient libérés», estime-t-il. «Il faut aussi l'obliger à lancer un appel à ses hommes pour qu'ils déposent les armes et se rendent. Après, Sankoh doit être jugé, condamné et exécuté.» Clameur d'approbation alentour où, toutefois, on trouve bien compliqué le procédé. «Maintenant, on s'en fout du désarmement! Il faut tuer Sankoh et, ensuite, éliminer tous ses boys qui portent encore un fusil», dit quelqu'un. «Coupons-lui les mains et discutons après!», lance quelqu'un d'autre.
Vox populi. Muctar Jalloh est le représentant, élu, du camp des amputés et victimes de guerre à Aberdeen Road, dans Freetown. Sur une pente s'accrochent des abris recouverts de bâches en plastique. Quelques 1 850 hommes, femmes et enfants s'entassent depuis trois ans en attendant la paix. 188 d'entre eux sont mutilés, d'un grand-père de 68 ans à une fillette, bébé de huit mois au moment des faits. On lui a coupé le bras gauche. A d'autres, les deux bras à la fois ont été tranchés, au niveau des épaules «manches courtes» ou des poignets «manches longues». Muctar Jalloh a perdu sa main droite et l'oreille du même côté. «Je hais Sankoh», dit-il. Les victimes des atrocités commises depuis dix a