Menu
Libération
Reportage

""A l'époque, tous les Algériens étaient français.""

Article réservé aux abonnés
publié le 17 juin 2000 à 1h33

Verdun envoyée spéciale

A quelques pas du mémorial pour la paix de Verdun, un agent consulaire algérien résume la situation à des jeunes gens coiffés de casquette à l'envers: "Vous avez la chance de vivre un moment fort de la visite du président Bouteflika en France puisque, pour la première fois, un chef d'Etat africain va rendre hommage aux soldats algériens morts dans l'armée française." Une famille partie de Constantine il y a quarante-deux ans replie la carte routière. Venus de plus loin dans le département, ils voulaient être là, physiquement. "Les Algériens de notre pays nous ont oubliés ici. Ils ne se rappellent de nous que lorsqu'il faut leur envoyer des chèques ou des cadeaux." Un pied-noir souffle. "Trop chaud." Il s'évente. "Comme là-bas." Hier, l'hommage aux poilus algériens a fait remonter l'odeur de toutes les guerres, terribles ou minuscules, brassées pêle-mêle dans le sillage d'un cortège officiel.

"Frères ennemis". A l'ossuaire de Douaumont, première étape de la visite, Leon Rodier, le maire, s'est avancé vers le président Bouteflika. "J'ai pas voulu me débiner. Je devais remplir cette mission." Né en Algérie en 1918, Rodier était un des plus haut gradés de l'armée d'Afrique, pendant la guerre d'Algérie, commandant des tirailleurs, "toujours en première ligne et sans une mutinerie". Léon Rodier a tendu la main. "Bouteflika, lui, était de l'autre côté, au Djebel [le maquis, ndlr]. Le hasard a voulu nous réunir là aujourd'hui, deux frères ennemis qui s'accolent