Pour le deuxième anniversaire de la mort de Matoub Lounès, sa femme Nadia, 24 ans, raconte ses doutes sur l'enquête officielle et la peur permanente dans laquelle elle vit en France, où elle s'est réfugiée. Le chanteur kabyle avait été assassiné le 25 juin 1998 dans une embuscade sur une petite route de montagne. Sa femme et ses deux soeurs, qui se trouvaient avec lui dans la voiture, avaient été blessées.
Vous avez accusé le GIA (Groupe islamique armé) de l'assassinat de votre mari, pour revenir ensuite sur ces accusations. Que s'est-il passé?
Juste après l'attentat, en juillet 1998, des enquêteurs sont venus m'interroger alors que j'étais encore à l'hôpital. Dans le procès-verbal qu'ils m'ont demandé de signer quelques jours plus tard, une phrase avait été rajoutée: "J'attribue l'attentat au GIA." J'ai demandé tout bas à ma grande soeur: "Je n'ai pas dit ça. Qu'est-ce que je fais?" Ils étaient trois policiers autour de nous. J'avais peur de tout, j'ai laissé passer. Avec mes soeurs, présentes dans la voiture au moment de l'assassinat, nous avons ensuite été convoquées par le juge d'instruction en octobre 1998. Pendant l'embuscade, j'avais moi-même perdu connaissance plusieurs fois, mais ma soeur Ouarda, elle, était sûre de reconnaître formellement deux des assassins. Malgré le danger, nous voulions la vérité. Elle a parlé au magistrat. Je l'attendais à la sortie du palais de justice. Elle m'a fait un signe de la tête: "C'est pas la peine." Dès lors, nous avons compris que no