Portadown, Drumcree envoyé spécial
C'est une veillée d'arme digne du Moyen Age. Il y a d'abord ce mur d'acier érigé en travers de la route, sorte de pont-levis hermétiquement fermé. Un chemin de ronde a été aménagé en haut des remparts. Des grues empilent des blocs de béton au-dessus des fossés remplis d'une eau boueuse. La terre a été retournée sur des centaines de mètres pour ralentir la progression d'éventuels attaquants. Sur l'autre rive, s'étend une forêt de pieux métalliques reliés entre eux par des fils barbelés. Tapis dans le bocage, les soldats en treillis pointent leur fusil mitrailleur vers un ennemi invisible.
Avec un tel dispositif, l'armée britannique espère bien stopper une fois encore la marche protestante vers le quartier catholique de Portadown, une des villes les plus divisées d'Irlande du Nord. Dimanche, comme chaque année, l'Ordre d'Orange, grand pourfendeur des "papistes", investira la petite église anglicane de Drumcree, bâtie en haut d'une colline verdoyante. Après la messe, des centaines de fidèles, avec collerettes, chapeaux melon et gants blancs, descendront ensuite Garvaghy Road et, au son du fifre et des tambours, viendront buter sur la muraille de fer.
Violentes émeutes. A l'approche de l'épreuve de force, la tension n'a cessé de monter dans toute l'Irlande du Nord. Pour la première fois depuis le début du processus de paix, il y a deux ans, les Land Rover blindées de l'armée britannique ont fait leur réapparition dans les rues de Belfast. Barricad