Les blondes. Toutes les blondes d'Alger. Les blondes parfaites qui se payent le coiffeur. Ou les blondes pas trop blondes, "ces intellos qui font gaffe par rapport à l'Occident, pour ne pas avoir l'air de copier". Et surtout, les vraies fausses blondes des quartiers populaires, celles qui ont commencé le jour de leur mariage. "Avant, on se serait fait traiter de pute." Elles n'ont plus jamais arrêté depuis. Elles ont 50, 60 ans.
Nadir Moknèche pourrait être blonde. Il sait tout, le décapage, la pose. Enfant, il regardait sa mère des matinées entières, et les voisines, et les cousines. Rinçage, avec tout le monde en cercle autour du lavabo. Raté. Trop foncé. "Cela me durcit les traits, non?" Alors, d'un coup, dans le tonnerre des portes qui claquent, la maison s'écroule dans une tragédie de salle de bain. Il y a eu cette tante devenue aveugle à force d'eau oxygénée, cette autre venue le jour de sa noce "avec ses vrais cheveux". Consternation générale. "Tu es folle. Tu ne vas pas rester brune." La mariée ne répond pas. "Tu es radine, c'est ça?"
En vrai, Nadir Moknèche, 35 ans, est réalisateur. Primé à l'Institut du monde arabe, son premier film est sorti hier. Le Harem de madame Osmane raconte la crise algérienne à travers la buée des shampoings sur les fenêtres du vestiaire pour dames. "Dans le cinéma algérien, nous sommes victimes de notre propre folklore colonial. Les femmes mangent des olives, un turban sur la tête. Si elles ont un rôle de combattantes, elles passent des mes