Nazran (Ingouchie) envoyé spécial
D'un geste machinal, Rachid enfonce la cassette dans le magnétophone, tout en tenant de l'autre main le volant de la Land-Cruiser frappée de l'emblème du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Un vieux tube des Rolling Stones résonne dans la steppe caucasienne. Devant la voiture du CICR, une Volga noire ouvre la voie. Les deux véhicules quittent Naltchik, la capitale de la république de Kabardino-Balkarie, et filent vers Nazran, en direction de la frontière tchétchène. Dans la Volga, à côté du chauffeur, trois soldats russes, solidement baraqués, en tenue de combat, se sont tassés comme ils ont pu dans le véhicule. Le cheveux ras, ils tiennent avec décontraction leur kalachnikov à la crosse usée. Question d'habitude. Ces soldats appartiennent à une unité d'élite de l'armée russe, les Rubop, spécialisée dans la lutte contre le crime organisé. Leur mission: protéger les délégués du CICR.
Rumeurs invérifiables. Assassinat, kidnapping politique ou «business» crapuleux des otages, le pire est toujours possible dans le Nord-Caucase. Les délégués du CICR ont payé le prix du sang pour le savoir. Le 17 décembre 1996, un commando armé de pistolets, munis de silencieux, pénétrait dans l'hôpital du CICR de Novi Atagui et assassinait dans leur sommeil six expatriés. Un «travail» de professionnels. Dans cette guerre alimentée par toutes sortes de rumeurs invérifiables, comment connaître l'identité des mystérieux commanditaires de ce crime sans précé