Beidaihe envoyé spécial
La première fois que Mme Chang est venue en vacances à Beidaihe, la station balnéaire située à 250 km à l'est de Pékin, c'était il y a seize ans, avec son «unité de travail»: elle était alors une «ouvrière modèle». Elle se souvient qu'il y avait moins de monde, moins de constructions, des visites guidées et surtout des ventilateurs poussifs qui brassaient l'air chaud dans sa chambre. Aujourd'hui, cette institutrice de la banlieue de Pékin, qui prend sa retraite l'année prochaine, a le sourire aux lèvres. Avec deux amies, elles se sont payées toutes seules leur billet de bus, se sont installées dans un hôtel moderne climatisé, n'ont pas à subir de visites en groupe et peuvent s'offrir des souvenirs inespérés. Joignant le geste à la parole, elle ouvre son sac et montre les deux bracelets de jade qu'elle compte offrir à sa belle-fille, les jouets en bois décorés de coquillages pour ses petits-enfants et, pour elle, des chaussures d'intérieur aux semelles de bambou «qu'on ne trouve pas à Pékin». «C'est beaucoup mieux aujourd'hui», dit-elle, alors qu'elle surplombe la baie de Beidaihe, à partir d'un promontoire rafraîchi par une brise salutaire.
A ses pieds, pourtant, le spectacle est celui d'une marée humaine ahurissante. Le moindre grain de sable est occupé par un parasol et une chaise longue. Et, dans la mer tiède à la douteuse couleur marron, des centaines de personnes s'immergent pour fuir la chaleur, certaines utilisant de vieux pneus rafistolés comme