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Libération

Procès du racisme ordinaire en Allemagne

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Trois skinheads jugés pour le meurtre d'un Mozambicain.
publié le 24 août 2000 à 3h39
(mis à jour le 24 août 2000 à 3h39)

Ce samedi 10 juin au soir, Christian, son ami Frank, 16 ans tous les deux, et Enrico, 24 ans, se sont rencontrés semble-t-il par hasard à la gare de Dessau, une ville au sud de Berlin. Cheveu ras tous les trois, canette de bière à la main et injure raciste prompte aux lèvres, ils sympathisent rapidement. Christian et Frank ont raté leur train pour rentrer chez eux à Wolfen, une petite ville à quelques kilomètres plus au sud. Tous trois retournent traîner en ville pour picoler, beuglant à travers rues leurs refrains habituels : «Nous sommes la résistance nationale !» «Les étrangers dehors !»

La nuit s'étire, grosse d'ennui en ce long week-end de Pentecôte pour ces trois skins désoeuvrés : les deux plus jeunes ont abandonné l'école, l'aîné a derrière lui un apprentissage de boulanger mais ne travaille pas non plus. Rien à faire d'autre ce soir que de vider bière après bière. Jusqu'à ce que passe Alberto Adriano, 39 ans, de retour d'une soirée chez des amis, un peu avant 2 heures du matin.ÊUn étranger ! Pire même, un Noir, comme il n'y en a que très peu en Allemagne de l'Est. Sur 80 000 habitants, Dessau ne compte que 1 750 étrangers : 2,2 % à peine.

Les trois skins commencent à coups de mots : «Qu'est-ce tu fous en Allemagne !?» «Cochon de Nègre, retourne dans ton pays !» Alberto tente d'expliquer qu'il est en Allemagne depuis 1980 déjà, venu du Mozambique comme «travailleur contractuel» recruté par l'ancienne RDA. Qu'il s'y est même marié à une Allemande, avec laquelle il a tro