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Libération

Eurofrilosité en ex-allemagne de l'est

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L'élargissement de l'Europe suscite peurs et espoirs.
publié le 14 septembre 2000 à 4h18

Francfort-sur-l'Oder envoyée spéciale

Posté sur le «pont de la Paix», dos tourné à la Pologne, Siegfried, 63 ans, résume le problème d'un geste: un grand moulinet du bras, comme pour ramasser toutes les populations d'ici à la Sibérie. «C'est bien simple: là-bas, ils veulent tous venir vers la Germany.ÊDe Pologne, de Russie, ils ont tous Germany en tête. Alors que nous avons déjà tellement de chômeurs ici!» Ce matin, Siegfried revient lui-même d'une tournée côté polonais. Il est allé y acheter ses cigarettes, 6 zlotys le paquet (9 francs environ), contre 18 francs côté allemand. Un sourire en coin, il montre les bosses suspectes formées par les paquets sous son blouson que les douaniers n'ont pas voulu remarquer. A l'idée que tous les contrôles disparaissent bientôt à cette frontière, après l'entrée de la Pologne dans l'Union européenne, son sourire pourtant se fige. «Non, vraiment, ça nous coûterait beaucoup trop cher.»

La récente sortie du commissaire européen Günter Verheugen, suggérant un référendum sur l'élargissement de l'Union, a révélé un problème de fond: plus se rapproche la perspective de l'adhésion de la Pologne ou de la République tchèque ­ avec lesquelles l'Allemagne partage une frontière terrestre de plus de 700 kilomètres de long ­, plus les peurs se réveillent. Si les référendums n'existent pas outre-Rhin, comme s'est empressé de le rappeler le gouvernement Schröder, les craintes sont bien là. Peur d'une invasion de travailleurs polonais payés à la diable, peur