Copenhague envoyée spéciale
Pour la sixième fois depuis 1972, l'Europe sème la guerre au Danemark. Une guerre de slogans et de clichés, certes très pacifique, mais qui ravive, dans ce petit pays si soudé, la fracture entre deux moitiés de la population. A la veille de décider s'ils adoptent ou non la monnaie unique, les quatre millions d'électeurs danois se divisent en deux camps de force quasi égale: le oui et le non au coude à coude autour de 45 %, avec encore 10 % d'indécis.
«On se rejoue la Première Guerre mondiale. A chaque référendum, chacun s'enterre dans les mêmes tranchées», soupire le député social-démocrate Claus Larsen-Jensen, qui préside la toute-puissante commission des Affaires européennes au Folketing, le Parlement danois. «Sept mois de campagne du matin au soir», 90 meetings, des débats télévisés à n'en plus finir et un rhumatisme tenace qui lui cisaille la jambe, «c'est trop long!». En blouson jaune et chemise de jean, il clopine pourtant vaillamment d'immeuble en immeuble pour bourrer les boîtes aux lettres d'un dernier appel à voter pour l'euro.
Les sondages de la semaine passée donnant 10 à 12 points d'avance au non ont provoqué la panique et le branle-bas de combat dans le camp du oui. Hier, le Premier ministre en personne, le social-démocrate Poul Nyrup Rasmussen, battait le pavé de la grande artère piétonne de Copenhague pour distribuer des roses aux électrices. Trois jours plus tôt, du jamais vu, les leaders des cinq partis pro-européens du Folketing ou