Chicago envoyé spécial
«Nous avons déjà gagné!», lance Ralph Nader, candidat des Verts à l'élection aux présidentielle. Ce cri de victoire pourrait sembler ridicule: Nader plafonne à 4 % des intentions de vote. Mais l'extraordinaire clameur qui lui répond pousse à le prendre au sérieux. Ce mardi soir-là, dans le stade couvert de l'université de l'Illinois, à Chicago, 9 500 jeunes surexcités ont payé 7 dollars pour voir et écouter leur héros politique. Ils hurlent de joie, scandent «Let Ralph debate!» («Laissez Ralph débattre!», allusion à son exclusion des débats télévisés), brandissent des panneaux étranges («Hippies for Congress»), et huent quand le mot «Bush» est prononcé par un orateur.
«Phénomène». L'événement de Chicago n'est pas un cas isolé: depuis trois semaines, Ralph Nader a attiré 10 500 personnes à Portland, 12 000 à Minneapolis, 10 000 à Seattle, 12 000 à Boston, et vendredi dernier, 15 000 sympathisants au Madison Square Garden de New York. Du jamais vu depuis les années 70. Nader «a déjà gagné»: il a réalisé un exploit dont ne sont capables ni George W. Bush, ni Al Gore: amener des milliers de jeunes Américains à la politique et à l'enthousiasme. Les analystes, qui jusque-là ne prêtaient pas attention au troisième candidat, parlent maintenant du «phénomène Nader» que gonfle le vent de Seattle.
Ralph Nader n'a rien d'une rock star. Ancien militant des causes consuméristes (la sécurité automobile, la liberté de l'information...), c'est un long insecte avec de gran