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Libération

En Géorgie, ils voient tout en noir.

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Dans un district très pauvre, le défi est d'amener les gens à voter.
publié le 30 octobre 2000 à 5h55

Albany (Géorgie) envoyé spécial

Les trains ne s'arrêtent plus à Smithville. La voie ferrée est toujours là, qui court dans la poussière le long de Main Street et de ses quatre baraques en bois. Mais bien loin l'époque où l'on chargeait sur les quais les ballots de coton ou de cacahuètes à destination d'Atlanta. L'hôtel qui accueillait les voyageurs avec sa célèbre «tarte au poulet» a été remplacé par une station-service. «Au milieu du siècle, on pensait encore que la ville allait bourgeonner comme un champignon, dit Larry, un vieux Noir qui mâchouille du tabac à côté du bureau du shérif. Mais ici, c'est un peu le milieu de nulle part, et ça n'a pas marché. La seule chose qui n'a pas changé, je peux vous le dire, c'est la couleur de peau de ceux qui travaillent dans les plantations. Les patrons, ils sont tous blancs. Les ouvriers, tous noirs. Si vous me trouvez un politicien qui peut me chambouler ça, je lui donne ma voix aujourd'hui.»

A une centaine de mètres de là, sous les chênes, Sanford Bishop, le démocrate qui est élu du 2e district de Géorgie à la Chambre des représentants depuis huit ans, en appelle à tous ceux qui, assis sur des bottes de paille, sont venus l'écouter. L'audience est celle des grands jours, 100 personnes peut-être, sur une population de 800 habitants. «En tant qu'afro-américain, j'ai besoin de vous, dit Bishop, j'ai travaillé dur au fil des ans, mais je veux continuer car il y a encore beaucoup de choses à faire. Ne vous méprenez pas, cette élection est