Abidjan envoyé spécial
Ils affluent. En taxi, à pied. Blessés par balles, à coups de machette ou de barre de fer. Ils sont militants du RDR (Rassemblement des républicains) d'Alassane Ouattara. Ou simples Dioulas (musulmans du Nord), battus parce que leur nom de famille «sonne mal». Ils réapparaissent, disent-ils, «maintenant que le calme est revenu», après les violences interethniques qui ont ensanglanté la Côte-d'Ivoire, les 26 et 27 octobre. Et auraient fait, selon le RDR, au moins 155 morts dont plus de 40 découverts dans un charnier (Libération d'hier). Plus de 400 blessés ont convergé, depuis, devant le domicile de Ouattara. Là, un hôpital de fortune les attend: deux lits, des nattes, des bâches.
«Lynchage». A côté du «centre de tri», des hommes sont allongés avec des perfusions tenues par des lianes. «Cinquante blessés graves ont été orientés vers des cliniques, dit un médecin en train de suturer la lèvre d'un gamin. Beaucoup ont gardé les balles dans le corps plusieurs jours.» Un adolescent, la tête couverte d'hématomes, s'extrait d'une voiture, porté par sa soeur. «Il marchait dans la rue, les gendarmes l'ont frappé, dit-elle. Il s'est évanoui. Ils l'ont jeté dans le caniveau. J'ai dû attendre le soir pour aller le récupérer.» «La plupart n'ont pas osé se rendre à l'hôpital, estime une des sept infirmières, occupée à panser une fracture ouverte. Ils avaient peur de représailles. Peur d'être dénoncés et livrés aux gendarmes.»
Un Malien assure ainsi «avoir été lynché»