Abidjan envoyé spécial
Ils parlent de «préférence nationale», de «Côte-d'Ivoire aux Ivoiriens», voire de «national-ivoirisme». Ils théorisent sur le nationalisme ou surfent sur le populisme. Ils justifient la répression des «ennemis de la nation» ou «expliquent» le massacre de Dioulas du 26 octobre (1). La plupart des intellectuels ivoiriens se radicalisent. Pourtant, ils s'en défendent toujours. Il n'y aurait pas de xénophobie, mais «un phénomène "nationalitaire", un désir de refonder le pays sur de nouvelles valeurs», croit ainsi savoir Paul N'Da. Ce politologue l'assure: «Nous voulons une repossession de la Côte-d'Ivoire. Les Dioulas tiennent l'économie. Il ne faudrait pas qu'ils veuillent, en plus, le pouvoir politique!» Ces propos fleurissent dans la rue ou les médias. Au départ simple levier politique, l'«ivoirité», sur fond de crise économique, tient désormais de la catharsis sociale.
La bête noire de ces intellectuels-là: «le Burkinabé», Alassane Dramane Ouattara. «ADO», ex-Premier ministre, à qui on réfute la nationalité ivoirienne «au nom d'une ascendance étrangère». A l'évocation de son nom, Bernard Dadié, écrivain, sort de ses gonds: «C'est la gangrène de la Côte-d'Ivoire, une tumeur qu'il faut éradiquer.» Que dit encore Paul N'Da? Qu'il n'y a «pas de problème ethnique ou religieux», mais «une exploitation de ces problèmes par Ouattara et son parti, le RDR, "le parti de l'étranger"», qui jouerait «la carte de la victimisation».
N'Da aime les grands mots et assène: «