«Bruxelles projette de bazarder nos passeports.» Le titre s'étalait le mois dernier à la «une» du Mail on Sunday, un journal dominical vendu à plus de deux millions d'exemplaires. Les armoiries de la reine, qui font la fierté du voyageur britannique, vont disparaître, affirmait le tabloïd, parce qu'un «eurocrate obscur» a décidé d'imposer en couverture les douze étoiles, symbole de l'Union. L'information, aussitôt démentie par un porte-parole de la Commission, était fausse. Elle a néanmoins contraint le travailliste Keith Vaz, ministre des Affaires européennes, de jurer sa fidélité à la Couronne et à son passeport, tandis que
le conservateur Francis Maud, en charge du même dossier au sein du cabinet fantôme, accusait le gouvernement
de vouloir une fois de plus bâtir un «super-Etat européen». Ainsi va le débat sur l'Union de ce côté-ci du Channel. Une manchette qui annonce les pires calamités, une réaction embarrassée de Downing Street et des cris d'orfraie de l'opposition.
La campagne orchestrée par les eurosceptiques marque d'autant plus les esprits qu'elle ne rencontre aucune résistance. Résultat, en juillet, seul un Britannique sur quatre portait un jugement positif sur l'UE, d'après un sondage commandé par Bruxelles. Soit le taux le plus bas depuis vingt ans. Prudent, Tony Blair ne délivre ses rares plaidoyers communautaires qu'en déplacement. Européen sur le continent, silencieux chez lui. «Ce n'est pas un accident si parmi la demi-douzaine de discours qu'il a consacrés à