Comme presque tous les gamins du monde, les jeunes Palestiniens sont gavés de télévision. Plus exactement de télévision palestinienne, ce qui n'est pas la même chose. Cette télévision, on la voit et on l'entend sans cesse, partout. Dans les ministères, dans les bureaux de la sécurité, chez les chefs de l'Intifada. Elle ronfle, ronronne ou hurle, mais diffuse sans arrêt les mêmes images, boucle mortifère et morbide, comme si elle avait passé un pacte avec un dieu des enfers. Car, si on la regarde un moment, on voit d'abord de jeunes Palestiniens qui courent dans les rues, qui courent à perdre haleine, tantôt pour lancer des pierres, tantôt pour fuir des soldats israéliens. Sans transition, on passe à d'autres séquences, terribles celles-ci, des images d'enterrements, de mourants, d'agonisants, avec de gros plans pour détailler les visages saisis dans leur douleur et les blessures dans leur gravité. Après, les caméras s'attardent sur les visages des mères et des soeurs. Litanies, pleurs, cris, transes. Et l'on revient aux jeunes Palestiniens qui courent. Les chebab approvisionnent la télévision de leurs images, lesquelles nourrissent à leur tour leur colère.
Majdi, 13 ans: libérer la Palestine
C'est notamment à cause de cette télévision que Majdi est aujourd'hui à la sortie nord de Ramallah. Il y vient chaque jour après l'école. «Parce que j'ai vu les soldats israéliens tirer sur les chebab. Je suis venu ici pour riposter.» Ici, c'est l'entre-deux-mondes. Un territoire où l'on est entre la vie et la mort. D'un cô