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Libération
TRIBUNE

Les failles de la démocratie américaine

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L'indécision de l'électorat, l'impossibilité d'un comptage rigoureux et le chaos juridique ont révélé les faiblesses du suffrage universel aux Etats-Unis.
publié le 19 décembre 2000 à 8h15

Plus le bulletin de vote compte, moins il a d'importance. Ce que l'on nomme peut-être abusivement «l'élection» présidentielle américaine fait éclater un formidable paradoxe. Par un hasard malheureux, le premier dépouillement automatique dans l'Etat clé de la Floride a attribué autant de voix (à 0,03 % près) à George W. Bush et à Al Gore. Dans un scrutin aussi extraordinairement serré, chaque suffrage est censé peser lourd. Hélas, les multiples imperfections du système électoral américain ont empêché de distinguer le vainqueur au fond des urnes. Impossible d'échapper à la marge d'erreur inhérente aux diverses manières de compter et de recompter les bulletins de vote. En conséquence, l'électeur a été privé de son dernier mot au profit d'instances de pouvoir comme le Congrès de l'Etat et la Cour suprême des Etats-Unis.

En se livrant à l'arbitrage final de la compétition présidentielle, les neuf juges de cette Cour ne se sont pas seulement gravement divisés selon des lignes de clivages clairement politiques. Ils ont aussi fait l'aveu d'un terrible dysfonctionnement de la démocratie américaine. Le serpent se mord ici la queue. Le président des Etats-Unis nomme les juges de la Cour suprême. Mais, cette fois-ci, ce sont ces mêmes juges qui ont choisi le président des Etats-Unis. Comme par hasard, les cinq membres de la majorité de la Cour qui ont refusé de recompter les voix en Floride, assurant ainsi la victoire de Bush, ont tous été nommés par un président républicain.

Cette invrai