Stockholm
de notre correspondant
Crime d'honneur, drame purement familial ou échec de l'intégration ? Un fait divers que vient de juger le tribunal de Stockholm partage les Suédois. L'héroïne en est Barin, une jeune Kurde irakienne de 20 ans, visage poupin aux cheveux noirs sagement tirés en chignon. A l'audience, elle n'a pas quitté des yeux les deux hommes assis plus loin, deux de ses oncles qu'elle accuse du meurtre de sa soeur Pele.
Son père Agid a pris la fuite, après s'être imputé le crime. Kurde du nord de l'Irak, il a obtenu en 1994 un permis de séjour en Suède. L'été suivant, sa famille le rejoint à Farsta, une banlieue immigrée de Stockholm. Pele, l'aînée des huit enfants, s'adapte très vite à sa nouvelle vie, apprend le suédois, s'épanouit socialement. Trop, au goût du père, chômeur, cloîtré dans son appartement. Il fait régner à la maison un régime oppressant : pas de télé suédoise, interdiction de rencontrer des amis.
Le père décide des vêtements, des chaussures et de la coiffure de ses filles. Même les fêtes traditionnelles kurdes leur sont interdites. «Un cas extrême, je n'ai jamais vu ça», affirme Kurdo Baksi, un Kurde, rédacteur en chef d'un journal sur l'immigration, qui voit dans cette affaire un échec de la politique d'intégration. «Quand un homme n'a pas de travail, ne parle pas la langue, ne connaît aucun Suédois, alors l'honneur de la femme, sa virginité sont tout ce qui lui reste à défendre.» Dans cette Suède où l'enfant est roi et «le droit à la libre se