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Libération

Un jeune commandant nommé Ariel.

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69 morts à Qibiya, en 1953. Des survivants témoignent.
publié le 5 février 2001 à 22h35

Qibiya (Cisjordanie)

envoyé spécial

Dans une société aussi rigide, prude et vissée par les traditions, l'islam et le regard des hommes, telle que se montre la société rurale palestinienne, il est exceptionnel qu'une femme ose briser les tabous du village pour livrer un pareil secret. «Nous étions quinze, cachés dans une étable et nous avions peur, si peur que personne ne pouvait se retenir. Nous faisions tous sur nous.» Autour d'elle, les hommes, un peu gênés par un tel aveu, font silence. La villageoise ajoute: «Pour que les enfants ne pleurent pas, on leur enfonçait le sein dans la bouche.» Alima Mahmoud avait 19 ans, ce 14 octobre 1953, lorsque l'unité 101 de l'armée israélienne enlève le gros village, alors jordanien, de Qibiya, à quelques kilomètres de la frontière. La formation était dirigée par un jeune commandant de 25 ans du nom d'Ariel Sharon. Selon l'historien israélien Martin Van Creveld (1), la tuerie fit 69 morts, pour la plupart des femmes et des enfants. Les autorités du village palestinien avancent le chiffre de 76 morts.

Quarante-huit ans plus tard, le jeune commandant s'apprête, si l'on en croit les sondages, à prendre la tête d'Israël. A Qibiya, le passé, évidemment, est remonté à la surface. «Comment un homme de massacres peut-il aujourd'hui faire la paix?», feint de s'interroger un jeune Palestinien.

L'opération israélienne commence vers 7 heures du soir. L'unité 101 réagit à l'attaque d'un commando de fedayin infiltré en Israël, qui, en regagnant la Jordan