Camp de Jelozai, Pakistan
envoyé spécial
«Nous sommes un véritable cimetière vivant, s'insurge Atoh Mohammed, un réfugié afghan arrivé voilà vingt-cinq jours au Pakistan. Chaque nuit, nous comptons les morts de froid et de dysenterie, et chaque matin nous en ramassons plusieurs, parfois 5 ou 6.» Quelque 75 000 Afghans, en majorité des paysans fuyant la famine et la sécheresse implacable qui a sinistré le nord du pays, se sont installés dans la plaine désertique bordant ce camp de Jelozai, à 30 km au sud de Peshawar. Le site, qui abrite déjà plusieurs dizaines de milliers de réfugiés afghans, installés souvent depuis les années 80, est géré par le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR). Ce lieu insalubre est aussi affecté par la sécheresse, et le simple fait de marcher suffit à soulever des nuages d'une fine poussière brune irrespirable.
A perte de vue, les gens s'entassent, survivant comme ils peuvent sous des bâches plastique récupérées qui ne les protègent pas du froid de la nuit. Beaucoup ont vendu jusqu'à leurs vêtements et couvertures pour cheminer jusqu'au Pakistan, le ventre vide. Un voyage souvent effectué à pied, qui leur a parfois pris un mois. Nombre d'entre eux choisissent ce pénible exil pour échapper au régime des taliban, au pouvoir à Kaboul depuis 1996. A Jelozai, les victimes du froid et des maladies sont surtout des enfants et des vieux, explique Abdul Shakoor, un réfugié tadjik qui tient à nous montrer le cimetière du camp, situé à l'écart. Les tombes fraîcheme