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Libération
Enquête

Les braises de la colère

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Plusieurs semaines après la tragédie de Noël à Luoyang, les proches des victimes continuent à manifester publiquement leur rancoeur envers les autorités locales, la corruption et l'incurie administrative.
publié le 9 février 2001 à 22h44

Luoyang envoyé spécial

Un épais brouillard enveloppe Luoyang ce matin-là, voilant pudiquement les immeubles HLM trop vite construits et contraignant les voitures à rouler au pas, comme dans un film projeté au ralenti. Il en aurait fallu plus pour décourager Mme Kong de se rendre devant la mairie de la ville, un imposant bâtiment gardé par de nombreux policiers. Nullement intimidée, cette sexagénaire d'apparence fragile, emmitouflée dans un manteau sans forme, interpelle les passants et raconte son histoire de manière désordonnée. On pourrait la prendre pour une folle, et elle-même dit qu'elle a parfois l'impression de perdre la raison, tant son sentiment d'injustice la torture. Pourtant, les passants l'écoutent et, généralement, l'approuvent, lâchent un ou deux mots d'encouragement, avant de repartir. La police laisse faire. Mme Kong est la mère d'une des 309 victimes de l'incendie de la nuit de Noël dans la discothèque Dongdu de Luoyang, une ville de 1,5 million d'habitants dans le Henan, à quelque 800 kilomètres au sud-ouest de Pékin : elle a perdu son fils, qui faisait vivre toute la famille.

«Justice pour les morts du 25 décembre»

Plusieurs semaines après la catastrophe, la colère des proches des victimes ne faiblit pas, largement partagée par la population d'une ville au passé impérial glorieux mais sinistrée par les restructurations industrielles et le chômage. Une colère face à une tragédie dont ils estiment qu'elle ne doit pas grand-chose à la fatalité mais tout à la co