Jalalabad envoyé spécial
Les taliban ont tué de manière systématique des centaines de civils de la minorité chiite hazara, le mois dernier à Yakawlang, au centre du pays. Libération a recueilli les témoignages de deux rescapés de ce massacre. Des membres d'organisations humanitaires et de l'ONU travaillant dans la région avaient fait état, fin janvier, de telles exactions, mais en des termes très généraux. Les taliban, au pouvoir à Kaboul, avaient aussitôt démenti tout en interdisant à la petite poignée de journalistes en poste dans la capitale afghane, comme aux responsables d'ONG occidentales ou de l'ONU, de se rendre sur place.
Ali, un Hazara, se souvient qu'il était dans le bazar de Yakawlang lorsque les taliban ont attaqué la ville, le 9 janvier. Celle-ci était tombée depuis peu aux mains de 250 combattants du Hezb-e Wahdat, une unité de moudjahidin composée d'Hazaras alliés au commandant tadjik Ahmed Shah Massoud, en lutte contre les «étudiants en théologie». L'opposition et les taliban (qui contrôlent 90 % du pays) mènent depuis des années une guerre de positions incessante. Les deux camps gagnent puis reperdent des régions, souvent au prix de lourdes pertes de part et d'autre.
«Plus que dix minutes à vivre.» «L'attaque a eu lieu vers midi, raconte Ali. Le Hezb-e Wahdat, qui n'avait plus de munitions, avait évacué la ville, ne laissant que deux combattants sur place. La première vague d'assaut des taliban est arrivée à pied, suivie de dizaines de pick-up tirant de tous