Genève de notre correspondant
Il s'en est fallu de peu que «le coup de Pinochet» ne se reproduise. Cette fois-ci, la cible était Abdallah Kallel, 57 ans, ex-ministre tunisien de l'Intérieur qui a dirigé sans état d'âme la répression contre les islamistes et l'opposition durant la dernière décennie. «Il est responsable de la torture de milliers de personnes», estime Eric Sottas, directeur à Genève de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT). Le 13 février, un employé de l'hôpital cantonal de Genève aperçoit l'ambassadeur tunisien chargé de fleurs qui se rend au 9e étage, où des patients sont sur «liste rouge». Objet de sa sollicitude: Abdallah Kallel, qui subit un triple pontage coronarien. Il avait été démis, le 24 janvier, de ses fonctions de ministre, devenu sans doute trop voyant alors que l'Union européenne et les Nations unies vont se pencher en mars sur les violations des droits de l'homme en Tunisie.
L'employé de l'hôpital appelle aussitôt Abdennacer Naït-Liman, président d'une association des victimes de la torture en Tunisie, réfugié établi à Genève depuis 1995, qui a été torturé dans les locaux du ministère de l'Intérieur entre le 22 avril et le 1er juin 1992. A cette époque, Kallel était ministre de l'Intérieur. Abdennacer Naït-Liman informe aussitôt Eric Sottas, directeur de l'OMCT, et contacte un avocat, François Membrez. Dans la nuit, ils préparent une plainte pour torture. Au matin du 14 février, elle est transmise à Bernard Schmid, procureur du canton d