Québec envoyés spéciaux
Les Québécois disent «brasser». «Ça brasse, avenue René-Lévêque», «Y'a du brasse-camarade sur la cote d'Abraham.» Brasser, c'est-à-dire secouer, cogner, castagner. Tout le week-end, ça a donc brassé dans les rues de Québec, autour de l'immense clôture qui protégeait les 34 chefs d'Etat et de gouvernement des pays américains. La nuit de samedi à dimanche a été la plus violente: gaz lacrymogènes contre jets de pierres, canons à eau contre palets de hockey. On comptait hier des dizaines de blessés et plus de 280 arrestations dont trois journalistes et un photographe. Le bourdonnement des hélicoptères, les fumées, les vitrines éventrées... Après Washington ou Prague, c'est à Québec que la bataille de Seattle a été rejouée. «Seuls les uniformes des flics changent», s'amuse un habitué. Récit.
Vendredi
15 heures, à la porte de l'avenue René-Lévêque. D'entrée de jeu, les manifestants ont gagné. La clôture métallique de trois mètres de haut, point de fixation symbolique des manifestants, ce «mur de la honte» est tombé. Cela s'est passé tout naturellement: un jeune homme agile a escaladé la barrière, s'est balancé, une fois, deux fois, et la porte s'est effondrée dans un immense cri de joie. Quelques dizaines de manifestants sont entrés calmement, en levant les bras en signe de victoire. En rangs serrés, les forces anti-émeutes sont arrivées au trot pour les repousser. Des manifestants leur ont jeté des pierres et d'autres projectiles. Les bombes de gaz lacrymogèn