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Libération
Interview

«Des gendarmes snipers»

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publié le 31 mai 2001 à 1h03

Hélène Flautre, députée européenne des Verts, s'est rendue en Algérie du 18 au 23 mai. En visite officielle dans le cadre de la délégation Maghreb de l'Europarlement, elle a vu à la fois les plus hauts rouages du régime et les jeunes manifestants de Tizi Ouzou.

Quelle situation avez-vous rencontrée à Tizi Ouzou?

J'ai rencontré beaucoup de manifestants, de familles de victimes et ce qui m'a frappée est de voir qui est mort et comment. Beaucoup de témoins évoquaient cette institutrice, une des seules femmes tuées au cours des émeutes. Sa mort me semble tout à fait symbolique. Elle a été abattue alors qu'elle assistait à la manifestation depuis le balcon de ses voisins. Pourquoi elle? Les gendarmes l'avaient remarquée distribuant du vinaigre aux manifestants en protection contre les lacrymogènes. A Tizi on racontent que les gendarmes se plaçaient sur le toit de leur caserne, comme des snipers et, de là, ajustaient leurs coups. Pas forcément contre ceux qui étaient en première ligne, au contraire. Ils lâchaient plutôt leurs balles sur ceux venus en renfort ou aidant les autres, comme pour décourager toute solidarité. On m'a raconté des chasses à l'homme en marge des émeutes, contre des manifestants ciblés, et poursuivis au-delà des villages. Des corps ont été retrouvés dans les bois. D'autres avec des balles dans le dos. Mais cela ne s'arrête pas avec la mort. Sur la blouse de l'enseignante dont nous parlions, il a été écrit: «Vive la gendarmerie, à bas la langue berbère.» Sa clas