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Le caviar des steppes hors la loi

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L'interdiction de la cueillette d'une herbe censée porter bonheur risque d'accentuer la misère des paysans du nord-ouest de la Chine.
publié le 27 juin 2001 à 1h22

Tongxin envoyé spécial

C'est l'histoire d'un jeu de mots qui a fait le bonheur des plus pauvres des paysans chinois, avant de les replonger dans la misère et l'illégalité. «Fa cai» : ces deux syllabes désignent une herbe sauvage des steppes du nord-ouest de la Chine, mais c'est aussi le voeu d'enrichissement que s'adressent les Chinois au nouvel an lunaire. Cette homonymie a séduit les Cantonais et les Hongkongais, qui, à l'affût de tout ce qui porte bonheur, se sont mis à consommer dans les années 90 de grandes quantités de fa cai, en soupe ou en légume. Les prix de cette herbe sans grande saveur venue des steppes lointaines et arides ont aussitôt flambé. La passion des Chinois du Sud pour ces superstitions a permis à des centaines de milliers de paysans des zones déshéritées du Nord-Ouest d'améliorer leur sort en récoltant le fa cai pour répondre à la demande. Jusqu'à ce jour de l'an dernier où le gouvernement central a décidé d'en interdire la cueillette pour protéger l'environnement. Selon les experts de Pékin, plus de 130 000 km2 de la seule Mongolie-Intérieure ont ainsi été rendus désertiques par l'arrachage du fa cai, une des causes des violentes tempêtes de sable qui, chaque printemps, affectent Pékin.

Sèche et noire comme une algue. Sans doute fondée, l'interdiction plonge dans la misère absolue les plus pauvres des pauvres. Nous les avons croisés au bord d'une route, près de Tongxin, une ville du sud de la province du Ningxia, dans le nord-ouest de la Chine : une vin