Il n'y a pas vraiment de surprise dans la Tunisie de Zine Ben Ali. Le chef de l'Etat tunisien vient de répondre comme il sait le faire aux doléances d'un haut magistrat, Mokhtar Yahyaou, connu pour son indépendance et sa modération. Il l'a suspendu de ses fonctions et privé de son salaire hier, réservant au juge rebelle le sort d'autres contestataires. Dans une lettre ouverte adressée le 6 juillet à Ben Ali en sa qualité de président du Conseil supérieur de la magistrature, ce magistrat avait dénoncé le «harcèlement» et les «intimidations» dont les juges sont l'objet, et avait prié le Président de les «libérer de [cette] tutelle».
La semaine dernière, déjà, la réaction du ministère de la Justice n'annonçait rien de bon. Il avait expliqué l'attitude du magistrat par... ses «démêlés avec la justice» dans un conflit l'opposant «à un citoyen» sur un terrain agricole. La sanction tombée lundi n'a guère étonné Mokhtar Yahyaou. «J'ai déjà pris congé de la magistrature dans son état actuel en publiant la lettre ouverte au Président», a-t-il seulement déclaré, en se disant «prêt à assumer, pour peu que cela puisse aider à libérer la justice en Tunisie». Et de persister: «Le Président doit remédier à la situation actuelle, l'essentiel étant de sauver la justice.» Dans ce pays où il ne fait pas bon contester la démocratie benalienne, le juge a reçu, hier, l'appui du conseil de l'ordre des avocats et de l'Association tunisienne des jeunes avocats.
Seule ombre au tableau pour Ben Ali, cett