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Libération

Ados au pays du soleil déprimant

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Stressés et suicidaires, les jeunes Japonais s'isolent du monde.
publié le 26 juillet 2001 à 0h10

Tokyo de notre correspondante

Dans l'étroite salle d'attente, l'homme et son épouse fuient les regards. Depuis des mois, ce couple refusait de faire le pas. Jusqu'à ce que la vie familiale devienne insupportable. «C'est toujours comme ça. Les parents attendent, résistent, puis craquent. Je les vois arriver brisés», confie Hidehiko Kuramoto, directeur de la clinique Kitanomaru, l'un des rares cabinets psychiatrique de Tokyo spécialisé dans le soutien aux familles de «Hikikomoris». Les «Hikikomoris» («celui qui se retire» en japonais), sont ces adolescents reclus face auxquels la société nippone est totalement désemparée. Le père et la mère qui patientent dans l'ombre ont un fils de 17 ans, Masahori, victime de ce syndrome. L'adolescent a déserté l'école, un jour de septembre dernier, puis rompu avec tous ses amis. Il s'enferme à longueur de journée dans sa chambre et refuse d'adresser la parole à qui que ce soit. Il se rend dans la cuisine ou dans la salle de bains seulement quand ses parents dorment ou sont sortis. «C'est un vrai fantôme», lâche sa mère en pleurs.

En marge. L'histoire de Masahori est un résumé saisissant du traumatisme qui conduit de plus en plus d'adolescents de l'archipel à s'isoler du reste du monde. Dans son quartier de Chubu, une ville de banlieue cossue de la périphérie de Tokyo, le jeune homme jouissait depuis des années d'une réputation d'élève doué, premier en maths et déjà promis au redoutable concours d'entrée de Todai, la prestigieuse université de