Bruxelles (UE) correspondance
Le rêve des fonctionnaires de la Commission européenne? Que tous les citoyens de l'Union parlent anglais, et que les langues nationales soient ramenées au rang de patois sympathiques, éventuellement enseignés dans quelques classes spécialisées. Exagéré? Sûrement pas. L'exécutif européen a dû précipitamment et discrètement enterrer, au début du mois de juillet, un texte prévoyant, sous couvert de «simplification», de passer du régime des trois langues de travail (anglais, français, allemand) en vigueur en son sein à celui de la langue unique: autrement dit, les documents n'auraient plus eu besoin d'être traduits dans les trois idiomes, comme aujourd'hui, mais dans un seul au choix. Or, vu la progression fulgurante de l'usage de l'anglais (depuis l'arrivée des Nordiques, notamment), il est évident que celui-ci «s'imposera comme langue unique», comme l'analyse un haut fonctionnaire français de la Commission: déjà, 55 % des documents sont rédigés dans la langue de Shakespeare (contre 40 % il y a dix ans), 44 % en français et... 1 % en allemand. Les ministres des Affaires étrangères allemand et français, Joschka Fischer et Hubert Védrine, qui ne sont pas nés de la dernière pluie, ont immédiatement envoyé une lettre conjointe au président de la Commission, l'italien Romano Prodi, lui demandant de revenir à la raison...
Un interprète letton-danois. Cette tentative de faire de l'Union une succursale linguistique de l'Otan ou de l'OCDE, où l'anglais