Les Etats-Unis savaient très précisément ce qui allait se passer au Rwanda au printemps 1994 : un génocide de plusieurs centaines de milliers de personnes. C¹est ce qui ressort de 15 documents «déclassifiés» à la suite des efforts d¹un chercheur, William Ferroggiaro, qui a bataillé pendant cinq ans pour cela, en s¹appuyant sur la loi américaine sur la liberté de l¹information. Rendus publics par National Security Archive, une organisation qui se bat pour la levée de la confidentialité sur les documents diplomatiques et militaires, ces 15 documents sont accessibles sur l¹Internet (1).
Un texte du Pentagone, daté du 11 avril, c¹est-à-dire quatre jours après le début des massacres des Tutsis, évoque le risque d¹un «bain de sang» de «plusieurs centaines de milliers de personnes». On comptera environ 800000 morts, en majorité des Tutsis mais aussi des opposants hutus, en moins de cent jours au Rwanda. Un autre document, un télégramme diplomatique du 29 avril, cite une conversation téléphonique entre l¹une des spécialistes de l¹Afrique du département d¹Etat, Prudence Bushnell (aujourd¹hui ambassadrice au Guatemala), et l¹un des organisateurs du génocide, le colonel Theoneste Bagosora (en attente de procès devant le Tribunal pénal international). Bushnell lui explique qu¹elle sait que l¹armée est derrière ces massacres et exige qu¹il les fasse cesser. «Les autorités qui voulaient savoir ce qui se passait le pouvaient. Elles ont choisi de ne pas savoir, car elles voulaient éviter à t