Bethléem envoyée spéciale
Sur le petit bureau qu'il a installé sur le trottoir, Walid Abu Snour a aligné sa calculette et ses billets de banque, retenus par des cailloux. Son bureau de change, deux mètres en arrière, a été pulvérisé par un bulldozer israélien. Le rideau de fer gît par terre. Le centre commercial où il travaillait a été systématiquement détruit par les troupes israéliennes qui ont occupé et livré bataille onze jours durant à Bethléem en représailles après l'assassinat de leur ministre du Tourisme. «Sharon m'a renvoyé deux mille ans en arrière! Je vis à l'âge de pierre maintenant, raille Abu Snour. Je crois qu'ils ont détruit mon magasin pour briser ma volonté mais, vous voyez, je suis encore là.»
Riposte. Les badauds et les voitures circulent au ralenti au lendemain du retrait israélien de Bethléem et Beit Jala, effectué dans la nuit de dimanche à lundi. Certains filment les décombres, photographient des canapés rouges, visibles à travers un mur éventré. Ils tâtent les trous creusés par les engins de guerre. «Les ruines que vous voyez aujourd'hui rendront Israël beaucoup plus vulnérable que le pays ne l'était déjà. Il faut s'attendre à trois fois plus de ruines côté israélien. C'est la nature des choses», commente Hisham Ahmed, professeur de sciences politiques à l'université palestinienne de Bir Zeit.
Au dire des anciens de Bethléem, la ville n'avait jamais connu pareilles destructions. Ni en 1948 au moment de la création d'Israël, ni en 1967 pendant la guerre