Le Caire de notre correspondante
Un long hurlement. Vêtu de blanc, le visage masqué derrière un mouchoir immaculé, l'homme se frappe violemment la tête contre le mur. «Je veux mourir, rugit-il, les yeux gonflés de larmes, deux ans de prison, pourquoi ? Je suis innocent !» Imperturbable, le président de la Cour de sûreté de l'Etat égyptien continue sa litanie de sentences. Face à lui, dans une minuscule cage grillagée, 52 hommes arrêtés pour la plupart le 11 mai au Queen Boat, une discothèque gay du Caire.
«Mépris de la religion». A l'extérieur de la salle d'audience, les avocats des prévenus martèlent la lourde porte en bois, exigeant d'assister au verdict. En vain. Ils n'apprendront que plus tard le sort de leurs clients : 29 acquittés, 23 condamnés à des peines allant de un à cinq ans de travaux forcés, pour «débauche» et «mépris de la religion». Accusés d'appartenir à une secte blasphémant l'islam et pratiquant la sodomie comme rite, ils n'étaient pas officiellement poursuivis pour homosexualité, la loi égyptienne ne s'y référant pas de manière explicite. Mais c'est pourtant bien de cela qu'il s'agit.
Pendant des mois, ce procès a fasciné la très conservatrice Egypte, qui s'accorde à penser que les homosexuels sont des «erreurs de la nature». La presse a convié des spécialistes à s'exprimer sur le sujet. Des docteurs en religion ont ainsi expliqué qu'il fallait éliminerÊles gays, soit en les brûlant vifs «pour tuer le microbe et éviter l'infection», soit en les jetant du hau