Fichu noir sur la tête, la petite vieille hésite quelques instants puis d'un pas décidé entre dans le bureau de vote surmonté du drapeau de l'OSCE. «Mon mari a sa tombe ici, et je veux rester pour être enterrée à ses côtés», explique Borka. Son petit-fils sourit un peu gêné mais dépose aussi son bulletin. Des soldats finlandais entourent l'école de Gracko. Une plaque de marbre noir commémore cinq victimes locales des bombardements de l'Otan et quatorze autres villageois «tués pendant les labours par le terrorisme albanais» en juillet 1999. Dans ce village protégé jour et nuit par la Kfor, comme dans les autres petites enclaves serbes du Kosovo où survivent 55 000 personnes , la participation électorale a été massive: 91 % de votants dans les villages autour de Lipjan, autant à Orahovac ou à Strpce, et même 100 % dans l'immeuble bunker de Pristina où vivent les 170 derniers Serbes de la capitale. «Ceux des enclaves n'ont pas d'autre choix que de tendre la main à la communauté internationale», ironise un Serbe de Mitrovica, la grande ville au nord du Kosovo, où 60 000 Serbes vivent sur un territoire limitrophe de la Serbie sans problème de survie et de sécurité. Dans ce fief ultranationaliste, à peine 10 % de votants. Des gros bras locaux sont restés toute la journée aux alentours du principal bureau de vote, dévisageant ostensiblement ceux qui y entraient. Une intimidation silencieuse mais efficace. «Près des trois-quarts des rares votants sont arrivés le soir», reconnaît