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Libération

«Pour nous, cette plaie ne se cicatrisera jamais»

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Zenji Abe, l'un des derniers pilotes japonais vivant de Pearl Harbor, ne pardonne pas à son pays.
publié le 7 décembre 2001 à 1h52

Tokyo de notre correspondant

Rien de plus difficile à supporter que l'infamie: «Dans le monde entier, Pearl Harbor rime avec fourberie car le Japon a déclaré la guerre après l'attaque. Pour nous, pilotes qui n'en savions rien, cette plaie ne se cicatrisera jamais!» Zenji Abe, vieux monsieur charmant de 85 ans, ne pardonne pas à la diplomatie nippone de l'époque d'avoir porté atteinte à son honneur. Dans son appartement de la banlieue de Tokyo, les souvenirs du 7 décembre 1941 sont omniprésents. Abe-san (monsieur Abe) était, à 25 ans, le plus jeune chef d'escadrille de la seconde vague d'appareils, arrivée au-dessus d'Hawaii une heure après le fameux «Tora, Tora, Tora» (Tigre, Tigre, Tigre) lancé pour ordonner l'assaut. Neuf bombardiers Aichi D3 A1 ­ l'équivalent japonais des Stukas allemands ­ opéraient sous sa responsabilité, avec un pilote et un navigateur chacun. Ballet funeste réglé par des semaines de préparatifs au-dessus de l'île montagneuse du Kyushu, au sud du Japon: «Chacun de nos gestes avait été répété des centaines de fois», se souvient l'ancien cadet de l'école aéronavale nippone, diplômé en 1938 et devenu après-guerre colonel des «Jetai», les forces aériennes d'autodéfense. «Même pendant les trois semaines de mer passées sur le porte-avions Akagi, mes hommes et moi ne pensions qu'au jour J. Nous pouvions désigner de mémoire l'emplacement de tous les bâtiments américains...»

Mémoire. Le ciel d'Hawaii à l'aube, vierge d'avions ennemis. L'escorte protectrice des ch