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Libération
Disparition

Dernier exil du poète-président Senghor

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Le père du Sénégal indépendant, chantre de la négritude, est mort hier.
publié le 21 décembre 2001 à 2h02

Mort hier à 95 ans, Léopold Sédar Senghor, le poète-président père du Sénégal indépendant, avait disparu de la vie publique depuis déjà longtemps. En 1981, après vingt ans à la tête du Sénégal, il avait cédé le pouvoir à son dauphin, Abdou Diouf, et s’était retiré en France, à Verson, sur les terres normandes de sa femme, Colette.

Qui était donc Senghor? Un Africain qui pensait et écrivait en français? Un intellectuel formé à Paris et catapulté presque malgré lui dans l’arène politique à l’aube des indépendances africaines? Un président qui affirmait ne pas aimer le pouvoir, dédaigner l’économie, et s’adressait à ses concitoyens comme à des élèves? Né à Joal sur la côte atlantique à une centaine de kilomètres de Dakar en 1906, ce fils d’un catholique polygame de l’ethnie sérère avait d’abord voulu être prêtre. Mais: «On nous enseignait que les Noirs n’ont rien apporté à la civilisation, je protestais», écrira le poète bien plus tard, ajoutant: «C’est au collège Libermann de Dakar que j’ai eu pour la première fois le sentiment de la négritude.» Un mot forgé avec le poète martiniquais Aimé Césaire pour défendre l’apport, jusqu’alors négligé, de la culture africaine à la civilisation mondiale. Arrivé à Paris à l’aube des années 30, Senghor fera de la négritude un combat permanent. En 1934, il fonde un journal, l’Etudiant noir, puis plus tard, en 1947, il sera avec Alioune Diop à l’origine de la célèbre revue Présence africaine, qui défendra la négritude et l’écriture africaine.